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Tous ces pères…

Tous ces pères…

Il me revient en tête tous les pères que j’ai croisés. Tous ces pères qui, avec leurs mots, leurs images, leurs expériences et leur bonne volonté, ont partagé « leur paternité » avec moi. Tous ces pères qui m’ont fait comprendre bien des choses sur le monde de la paternité, malgré eux peut-être… À force d’écouter les papas, je me suis vu. Je me suis regardé.

Et, oui, je me suis comparé. Les autres papas m’ont fait comprendre une chose bien importante: il ne faut jamais se comparer. Mais devant les accomplissements des autres pères, je vis un drôle de sentiment. Une sorte de jalousie.

Pourquoi je ne fais pas, moi, avec mes enfants, ce qu’eux font avec les leurs? Ça me semble important de faire ce genre d’activité. Ma blonde me dit que c’est plutôt de l’admiration que j’éprouve. Bon! Si elle le dit… Quand j’apprends qu’un papa fait au moins 20 km de vélo par jour avec ses flos et que tout le monde aime ça, je suis jaloux… Je veux dire admiratif. Quand j’apprends qu’un autre papa fait de l’astronomie amateur, qu’il a construit un télescope avec ses enfants et que, la nuit, à l’heure où mon dentier à moi dort dans son verre d’eau, il escalade, avec son fils et sa fille, des montagnes pour aller voir la grandeur de notre univers, je suis… admiratif.

Quand j’apprends qu’un père a mis sur pied un projet de film étudiant à l’école de ses enfants, qu’il a implanté dans les ordis tout ce qu’il faut pour faire du montage et qu’il a aidé à écrire et à réaliser une douzaine de films de 10 minutes avec 60 jeunes… tout ça parce que son fils voulait faire du cinéma à l’école… Je suis admiratif. Puis, devant ce père qui, faute de personnel au service des loisirs municipaux, a pris en charge sans aucune expérience l’équipe de soccer pendant plusieurs saisons pour que son fils puisse jouer, je suis admiratif. Et cet autre, qui fait tout pour que ses ados-jeunes adultes puissent commencer la vie du bon pied et rénove les nouveaux appartements de ses deux fils presque tous les 1er juillet… Tout y passe, de la peinture au transport de meubles, au ménage… Je suis admiratif.

Ces papas qui, sans dire un mot, donnent tout ce temps à leurs enfants. Tout ce temps qui pourrait être du temps pour eux. Du temps où ils pourraient revendiquer… un peu de temps à eux! Des papas qui, après une journée de travail, n’ont plus d’énergie pour rien, mais qui enfilent quand même l’habit de papa pour refaire un tour de piste. Et cet autre père, qui ne pouvait pas aligner deux mots, qui ne savait pas lire, qui était très peu cultivé (il avait déjà entendu parler de Michel Tremblay, une fois), et qui, aussitôt dans la forêt avec ses deux fils et sa fille, devenait un guide hallucinant, un interprète hors du commun. Je suis admiratif.

J’ai aussi entendu l’histoire de ce papa qui, très tôt, avait appris à ses filles que, si elles voulaient avoir un cheval comme elles en rêvaient, elles devaient gagner leurs sous. Il a donc entrepris de leur enseigner ses secrets de boulanger et, avec ce qu’elles cuisinaient tôt le matin, elles réussirent à s’acheter un cheval… chacune. Alors là, je suis jaloux. Et ce papa encore, qui (comme plusieurs sûrement) se lève très tôt tous les matins de la fin de semaine pour aller à l’aréna, qui aide son enfant à se mettre en tenue, puis qui attend la fin de la partie de hockey pour voir son sourire. (Ce papa déteste le hockey!) Je suis admiratif.

Et celui qui a fait construire pour son fils quadraplégique un siège spécial adapté à son vélo, parce que le seul moment où son enfant presque éteint manifeste une quelconque réaction, c’est lorsqu’il a du vent dans ses cheveux. Alors, ce papa-là pédale partout dans le monde et dans toutes les compétitions possibles pour entendre son fils crier quelque chose d’inaudible, mais qui ressemble à « Encore! » Il pédale pour deux, malgré le fait qu’il ait passé depuis longtemps l’âge de la retraite.

Quand j’ai devant moi un papa qui fait de ces choses extraordinaires pour l’amour de ses enfants, je suis jal… admiratif.

Est-ce que c’est ça, donner le meilleur de soi?

Texte rédigé hiver 2009